La prise de Son Tay
2 participants
Page 1 sur 1
La prise de Son Tay
La prise de Son Tay
Communiqué par son arrière-petit neveu, le colonel de Parisot, ce récit est extrait d'une lettre envoyée par le lieutenant Beynet, du 3ème Régiment de Tirailleurs Algériens, à sa famille le 31 décembre 1883.
Nommé capitaine peu de temps après et muté sur sa demande à la Légion Etrangère, cet officier fut tué le 6 octobre 1884 lors du combat de Lam entre Bac Ninh et Lang Son.
L'ordre est arrivé de quitter Hanoï dans la nuit du 10 au 11 décembre. Notre colonne, ayant pour mission d'arriver à Son Tay par la digue, se composait du régiment de marche (deux bataillons de Tirailleurs, un bataillon de la Légion Etrangère) et d'un bataillon d'Infanterie de Marine, le tout sous les ordres du colonel Belin.
Une deuxième colonne, composée d'Infanterie de Marine sous les ordres du colonel Bichot suivait une ligne parallèle.
Les deux colonnes devaient se rejoindre au Fleuve Rouge, au point où la flottille de l'amiral Courbet devait aboutir. Les canonnières transportaient les compagnies de débarquement de Fusiliers Marins et l'artillerie de la flotte. Six batteries d'artillerie de marine équipées de pièces de quatre de montagne étaient jointes aux colonnes d'infanterie, précédées toutes deux d'une compagnie de Tirailleurs Annamites, précieux pour fouiller les villages.
Enfin, avec notre colonne marchait un bataillon d'Auxiliaires Tonkinois, armés et instruits en peu de temps, et qui nous ont fait plus de mal que de bien.
Ce pays est tellement curieux, inondé, coupé de régions humides, que les deux colonnes n'avaient pour chemin qu'une chaussée de deux mètres de largeur au plus. Je vous laisse à penser si elles s'étendaient. La queue da chacune d'elle était certainement à quelques kilomètres de la tête. Ajoutez à cela que le pays est bordé de villages entourés de bambous d'une hauteur démesurée formant une enceinte fortifiée naturelle, que les deux colonnes d'infanterie devaient marcher à la même hauteur en se guidant sur un drapeau qu'il était impossible d'apercevoir, que la digue détrempée en maints endroits arrêtait souvent l'artillerie, et vous aurez une idée des obstacles qu'il a fallu surmonter.
Dans ces marches fatigantes, l'artillerie s'est montrée admirable comme toujours. A défaut des chevaux, qui la plupart du temps restaient sourds à la voix et aux coups, les artilleurs s'attelaient eux-mêmes à leurs pièces que plus d'une fois ils ont préservées d'un plongeon dans les rizières.
Le premier jour nous arrivions devant le Day, bras du Fleuve Rouge, qu'il fallait absolument traverser. Le Génie reçoit l'ordre de construire pendant la nuit un pont de bateaux, de façon à opérer le passage dès le lendemain matin. L'incurie la plus complète a malheureusement présidé à cette opération. La violence du courant rompt les amarres de la partie du pont déjà établie. Le reste suit à la dérive.
Le chef du Génie perd la tête, il faut croire, de sorte qu'à sept heures du matin lorsque nous arrivons devant le fleuve... impossible de traverser. Le passage avait été, du reste, fort mal choisi et aboutissait sur la rive droite à un talus très élevé qu'hommes, chevaux et pièces ont eu toutes les peines du monde à gravir. Le colonel Belin avait déjà annoncé à l'amiral que le passage serait effectué à neuf heures du matin. Heureusement quelques sampans étaient amarrés à la rive. Faute de mieux, on les utilise et vers huit heures, l'opération commence. Elle devait se terminer vers huit heures du soir. Une journée absolument perdue.
A huit heures trente, on mettait sac à dos, et nous voilà partis, ne nous arrêtant qu'à quatre du matin sur la digue. Il s'agissait de se mettre rapidement en contact avec la flottille qui remontait le fleuve et de sentir les coudes de la colonne Bichot. D'où la raison de la marche de nuit. Le lendemain nous traversions quelques villages absolument déserts, les habitants ayant fui devant nous, et vers deux heures de l'après-midi, nous bivouaquions en plein champ de riz.
Le quatorze nous levons le camp. Ordre nous est donné de nous diriger sur Son Tay. Vers onze heures du matin, nous débouchons sur le Fleuve Rouge après avoir traversé plusieurs villages extrêmement fortifiés, mais abandonnés par leurs défenseurs.
Toute la résistance semble s'être concentrée dans Son Tay devant lequel l'ennemi a élevé des retranchements formidables. Au fleuve nous rejoignons la colonne Bichot et la flottille. Le temps était splendide ; le soleil brillait. Hélas ! plus d'un le voyait pour la dernière fois.
En avant de Son Tay le fortin de Phu Sa est l'objectif désigné. Vers une heure de l'après-midi un bataillon reçoit l'ordre de se porter en avant. Le feu des canonnières a commencé ; les grosses pièces de quatorze font pleuvoir sur le fortin des obus énormes. L'ennemi répond, ses gros boulets venant mourir dans les eaux sans atteindre la flottille. A gauche une batterie de quatre prend le fortin à revers. La canonnade prépare l'attaque. A ce moment ma compagnie qui se trouvait en tête reçoit l'ordre d'aller se placer en soutien de cette artillerie ; les trois autres compagnies se portent en avant, et la fusillade, une fusillade épouvantable, commence.
A notre gauche les tirailleurs annamites et la Légion ouvrent le feu sur la digue. L'ennemi riposte vivement ; les balles, quelques boulets viennent tomber juste devant les faisceaux de ma compagnie. Tout à coup, vers quatre heures et demie, les clairons sonnent la charge ; c'est le moment de l'assaut. Les 1ère, 2ème, 3ème compagnies de mon bataillon se précipitent la baïonnette au canon. Pendant ce temps ma compagnie reste l'arme au pied, à côté de l'artillerie ; mon capitaine et moi nous regardons, et la même pensée se fait jour dans nos yeux, dernier souvenir aux camarades qui tombent à cette minute.
L'assaut a été épouvantable. Trois compagnies de mon bataillon sont en tête, suivies par un bataillon d'Infanterie de Marine. On entre dans le fortin pour ainsi dire en file indienne, chacun poussant son voisin, et voulant arriver le premier. Au fortin succède un long boyau étroit où tout le monde se heurte, courant en avant. Au bout de 500 mètres une tranchée est enlevée. Cent mètres plus loin une barricade formidable, à un étage, armée de canons. Les Pavillons Noirs lâchent le fortin, parcourant le boyau au pas de course, abandonnant la tranchée et se réfugiant derrière la barricade en terre et en bambous. De là, ils font pleuvoir sur nos hommes une grêle de balles. En un instant le capitaine de la première compagnie est tué ainsi que son aspirant à côté de lui ; le commandant Jounneau tombe blessé, le capitaine de la deuxième compagnie idem ; trois lieutenants français sont blessés, ainsi qu'un sous-lieutenant indigène.
Cent vingt neuf sous-officiers, caporaux et soldats sont tués ou blessés. Tout cela dans les trois premières compagnies de mon bataillon. Un lieutenant d'Infanterie de Marine est mortellement frappé ; le capitaine Doucet des Tirailleurs Annamites est tué raide d'une balle dans la tempe. D'autres officiers tombent, dont j'ignore les noms.
Voici un épisode authentique de la prise de Phu Sa. En arrivant devant la barricade, et devant le feu terrible qui les accueille, les tirailleurs hésitent. Le capitaine de la première compagnie, qui avait mis son casque au bout de son bâton, se retourne et voyant cette hésitation s'écrie : "Ils me quittent, allons nous faire tuer". Il tombe, rééditant le mot de Douai à Wissembourg.
L'espace entre la tranchée et la barricade est abandonné par nous ; nos tirailleurs sont obligés de reculer devant l'incendie que viennent d'allumer les Pavillons Noirs au moyen de fusées. Les cagnas prennent feu.
Bon nombre de blessés y ont été déposés ; impossible de les en retirer. C'est à grand peine qu'on emporte le capitaine de Tirailleurs et le lieutenant de l'Infanterie de Marine. L'incendie gagne, on se retire derrière la tranchée, et là commence un feu terrible qui a duré jusqu'à six heures du matin.
A huit heures, ma compagnie reçoit l'ordre d'aller rejoindre le bataillon. Nous partons et arrivons au fortin sous un clair de lune admirable. L'ennemi du haut de sa barricade dirigeait sur le boyau perpendiculaire un feu nourri. Nous débouchons dans le boyau et nous établissons dans la tranchée parallèle au fleuve de façon à prévenir tout mouvement tournant.
Les balles sifflaient, le canon ennemi tonnait. De gros biscaïens venaient tomber à côté de nous. A dix-sept heures nous recevons l'ordre d'aller relever, à la tranchée parallèle à la barricade, la 3ème compagnie épuisée. La relève d'une compagnie aux prises avec l'ennemi est toujours difficile. Néanmoins il faut y aller. Nous nous avançons dans le boyau ; en cinq minutes deux hommes de ma compagnie sont tués, douze tombent blessés, dont un officier indigène, le lieutenant.
Nous arrivons à la tranchée où nous passons une nuit inoubliable. Le feu n'a pas cessé une minute de onze heures du soir à six heures et demie du matin. Une pluie de projectiles tombait sur nous, rasant nos têtes, allant frapper de tous côtés. Les Pavillons Noirs essaient plusieurs fois de reprendre leur tranchée et par suite le boyau et le fortin, clé de Son Tay. Ils arrivent jusque sur la tranchée et mon sous-lieutenant est obligé de faire usage de son revolver sur un chinois qui monte sur le parapet. Ils essaient de tourner la position, lançant des fusées ; peine perdue.
De temps à autre nous recevons l'ordre de tenir jusqu'au bout à tout prix. Et pourtant les cartouches se font rares. Le capitaine envoie note sur note.
Il nous faut du soutien ; on nous envoie un peloton et des munitions.
Ah ! nous n'avions guère envie de dormir cette nuit là, et pourtant nous étions éreintés. Vers deux heures du matin, les auxiliaires tonkinois qui se trouvaient près de nous prennent peur. Ils voient des chinois partout, se lèvent en désordre, et prennent la fuite. Nos tirailleurs perdant la tête les suivent. Alors mon capitaine, le sous-lieutenant français, le sous-lieutenant indigène et moi nous précipitons le revolver à la main, menaçant de brûler la tête du premier fuyard. Ils reviennent, mais les auxiliaires que la peur affole, chargent leurs armes et nous tirent des coups de fusil dans le dos
C'est miracle que nous n'ayons pas été touchés. Le calme revenu, le capitaine proteste vigoureusement auprès du commandant des auxiliaires qu'on se décide à emmener. Nos tirailleurs sont seuls désormais, et leur feu devenu plus régulier balaye le terrain, et enlève aux chinois l'envie de reprendre l'offensive.
L'amiral Courbet entendait cette fusillade épouvantable. Plusieurs fois il s'est écrié : "Oh ! mon Dieu, pourvu qu'ils tiennent là-bas". Et nous avons tenu, et Phu Sa, la clé de Son Tay, est resté entre nos mains.
Succès chèrement acheté. Nous avons perdu le quart de nos effectifs ; le tiers de nos officiers a été mis hors de combat. Aussi le lendemain je faisais construire, par ordre, une tranchée. L'amiral vient à moi et me dit : "Il ne manque à cette tranchée que des fleurs, lieutenant". "Des immortelles, amiral" lui ai-je répondu. Il a souri et a passé outre.
Désormais le drapeau du 3ème Tirailleurs a un nom de plus à inscrire sur ses plis. Il en a bien le droit ; les chefs et les camarades laissés à Constantine savent que leur régiment a été dignement représenté à cette fête de la mort. Mais ce sont là des victoires à la Pyrrhus ; il n'en faudrait pas beaucoup de cette taille pour diminuer sensiblement nos forces. Aussi je suis convaincu que l'amiral attendra les renforts annoncés pour marcher sur Bac Ninh.
Il faut, en effet, laisser trois bataillons et deux batteries à Son Tay pour garder la place. Ah ! si le lendemain on avait pu marcher sur Bac Ninh, la démoralisation aidant par suite du coup de foudre qui a surpris les Pavillons Noirs, nous serions maîtres aujourd'hui du Nord tout entier. Il faut attendre, mais j'estime qu'avant que cette affaire arrive, l'affaire sera dans le sac, et que chinois et Pavillons Noirs auront mis les pouces. J'ai prononcé le mot chinois à dessein, car les Pavillons en comportaient dans leurs rangs : j'en ai vu.
A six heures du matin le quinze, les Pavillons abandonnent leur barricade, et nous en prenions possession. Elle était armée d'une façon formidable, et construite d'une manière remarquable. Certainement derrière ces scélérats se trouvent des gens distingués, d'un mérite et d'un savoir incontestables ; qui sait, des européens peut-être ? La levée des cadavres se fait. Tous ceux qui, frappés mortellement n'avaient pu se retirer derrière la tranchée, étaient là, les uns carbonisés, les autres le cou coupé.
Pendant la nuit, malgré notre feu meurtrier, l'appât du gain avait poussé les Pavillons Noirs à venir couper les têtes de nos soldats. Nos têtes sont mises à prix et sont payées selon le grade. Nul de nous n'oubliera le spectacle navrant que nous avons eu devant les yeux.
Le seize la fête recommence. La Légion Etrangère en a eu la plus belle part. Quelle troupe admirable au feu ! Quelle régularité dans les mouvements ! Ce n'est plus l'impétuosité farouche de nos tirailleurs, ce n'est point l'élan fataliste qui fait mépriser la mort à nos hommes ; c'est le calme, le sang-froid, et cette discipline au feu que nous ne parvenons pas à obtenir des nôtres. Leurs feux de salve ont été remarquables ; au moment de l'assaut ils y sont allés avec insouciance et fermeté.
Le front de la position était plus étendu, c'est ce qui explique leurs pertes moins élevées que les nôtres. Leur capitaine adjudant major a été tué raide ; deux autres capitaines blessés, quatre-vingts hommes hors de combat. La position a été brillamment enlevée.
A cinq heures et demie on pénétrait dans la ville, et les Pavillons Noirs épouvantés fuyaient en nous canardant. La nuit, pas un coup de fusil et le lendemain, à la surprise générale, on trouvait complètement évacuée la citadelle qui semblait devoir nous coûter encore tant d'efforts.
En résumé, un grand pas a été franchi dans la pacification du Tonkin avec la prise de Son Tay. Reste Bac Ninh. Une fois cette place tombée, tout ne sera pas fini, car il faut distinguer ici entre chinois, Pavillons Noirs et pirates. Les uns quitteront le pays, je le crois, à la suite de la prise de Bac Ninh et d'une solution diplomatique quelconque. Les seconds forment le noyau de la résistance.
Après leur défaite, ils se disperseront et se feront pirates, ressemblant fort par leur manière d'agir aux moustiques qui nous harcèlent. Les pirates pressurent le pays, pillent les villages, inondent la contrée ; ce sont certainement ceux dont l'anéantissement demandera le plus de temps.
Je n'essaierai pas de dépeindre la situation qui régnait dans Son Tay le lendemain de la prise de cette ville. Dans les rues des cadavres partout, les uns brûlés, les autres crispés. Des cagnas en feu, et par dessus tout, le tableau affreux d'un pillage féroce.
L'esprit reste frappé de stupeur quand on s'arrête devant des retranchements élevés par nos ennemis. On se demande comment des gens qui ont montré tant d'opiniâtreté pendant trois jours, ont pu se laisser aller aussi facilement à la démoralisation. Ils eussent résisté comme le premier jour, nous aurions été obligés d'entreprendre un siège en règle, et alors que de sang versé encore et que de temps perdu ! La nouvelle de la prise du fort de Phu Sa est tombée comme un coup de foudre sur leur résolution. Ils se sont concentrés dans la première enceinte : celle-ci ayant été enlevée par la Légion en un après-midi, ils ont pensé que la citadelle ne leur offrait plus assez de garanties.. La peur les a pris et ils se son enfuis dans la nuit. Et cependant elle était fortifiée cette citadelle ! Des canons partout, des canons que la France leur a donnés en 1874, et qu'ils ont retournés contre nous. Impossible de se faire une idée des munitions que nous avons trouvées dans la citadelle. Des cartouches de tous les pays, surtout de provenance anglaise. Les fusils Remington et Winchester dominent.
A minuit, la citadelle était évacuée. Le chef des Pavillons Noirs, Hoang, parent de l'empereur Tu Duc, avait décampé à trois heures de l'après-midi. Il n'avait pas attendu la fin de la danse.
Lieutenant BEYNET
Communiqué par son arrière-petit neveu, le colonel de Parisot, ce récit est extrait d'une lettre envoyée par le lieutenant Beynet, du 3ème Régiment de Tirailleurs Algériens, à sa famille le 31 décembre 1883.
Nommé capitaine peu de temps après et muté sur sa demande à la Légion Etrangère, cet officier fut tué le 6 octobre 1884 lors du combat de Lam entre Bac Ninh et Lang Son.
L'ordre est arrivé de quitter Hanoï dans la nuit du 10 au 11 décembre. Notre colonne, ayant pour mission d'arriver à Son Tay par la digue, se composait du régiment de marche (deux bataillons de Tirailleurs, un bataillon de la Légion Etrangère) et d'un bataillon d'Infanterie de Marine, le tout sous les ordres du colonel Belin.
Une deuxième colonne, composée d'Infanterie de Marine sous les ordres du colonel Bichot suivait une ligne parallèle.
Les deux colonnes devaient se rejoindre au Fleuve Rouge, au point où la flottille de l'amiral Courbet devait aboutir. Les canonnières transportaient les compagnies de débarquement de Fusiliers Marins et l'artillerie de la flotte. Six batteries d'artillerie de marine équipées de pièces de quatre de montagne étaient jointes aux colonnes d'infanterie, précédées toutes deux d'une compagnie de Tirailleurs Annamites, précieux pour fouiller les villages.
Enfin, avec notre colonne marchait un bataillon d'Auxiliaires Tonkinois, armés et instruits en peu de temps, et qui nous ont fait plus de mal que de bien.
Ce pays est tellement curieux, inondé, coupé de régions humides, que les deux colonnes n'avaient pour chemin qu'une chaussée de deux mètres de largeur au plus. Je vous laisse à penser si elles s'étendaient. La queue da chacune d'elle était certainement à quelques kilomètres de la tête. Ajoutez à cela que le pays est bordé de villages entourés de bambous d'une hauteur démesurée formant une enceinte fortifiée naturelle, que les deux colonnes d'infanterie devaient marcher à la même hauteur en se guidant sur un drapeau qu'il était impossible d'apercevoir, que la digue détrempée en maints endroits arrêtait souvent l'artillerie, et vous aurez une idée des obstacles qu'il a fallu surmonter.
Dans ces marches fatigantes, l'artillerie s'est montrée admirable comme toujours. A défaut des chevaux, qui la plupart du temps restaient sourds à la voix et aux coups, les artilleurs s'attelaient eux-mêmes à leurs pièces que plus d'une fois ils ont préservées d'un plongeon dans les rizières.
Le premier jour nous arrivions devant le Day, bras du Fleuve Rouge, qu'il fallait absolument traverser. Le Génie reçoit l'ordre de construire pendant la nuit un pont de bateaux, de façon à opérer le passage dès le lendemain matin. L'incurie la plus complète a malheureusement présidé à cette opération. La violence du courant rompt les amarres de la partie du pont déjà établie. Le reste suit à la dérive.
Le chef du Génie perd la tête, il faut croire, de sorte qu'à sept heures du matin lorsque nous arrivons devant le fleuve... impossible de traverser. Le passage avait été, du reste, fort mal choisi et aboutissait sur la rive droite à un talus très élevé qu'hommes, chevaux et pièces ont eu toutes les peines du monde à gravir. Le colonel Belin avait déjà annoncé à l'amiral que le passage serait effectué à neuf heures du matin. Heureusement quelques sampans étaient amarrés à la rive. Faute de mieux, on les utilise et vers huit heures, l'opération commence. Elle devait se terminer vers huit heures du soir. Une journée absolument perdue.
A huit heures trente, on mettait sac à dos, et nous voilà partis, ne nous arrêtant qu'à quatre du matin sur la digue. Il s'agissait de se mettre rapidement en contact avec la flottille qui remontait le fleuve et de sentir les coudes de la colonne Bichot. D'où la raison de la marche de nuit. Le lendemain nous traversions quelques villages absolument déserts, les habitants ayant fui devant nous, et vers deux heures de l'après-midi, nous bivouaquions en plein champ de riz.
Le quatorze nous levons le camp. Ordre nous est donné de nous diriger sur Son Tay. Vers onze heures du matin, nous débouchons sur le Fleuve Rouge après avoir traversé plusieurs villages extrêmement fortifiés, mais abandonnés par leurs défenseurs.
Toute la résistance semble s'être concentrée dans Son Tay devant lequel l'ennemi a élevé des retranchements formidables. Au fleuve nous rejoignons la colonne Bichot et la flottille. Le temps était splendide ; le soleil brillait. Hélas ! plus d'un le voyait pour la dernière fois.
En avant de Son Tay le fortin de Phu Sa est l'objectif désigné. Vers une heure de l'après-midi un bataillon reçoit l'ordre de se porter en avant. Le feu des canonnières a commencé ; les grosses pièces de quatorze font pleuvoir sur le fortin des obus énormes. L'ennemi répond, ses gros boulets venant mourir dans les eaux sans atteindre la flottille. A gauche une batterie de quatre prend le fortin à revers. La canonnade prépare l'attaque. A ce moment ma compagnie qui se trouvait en tête reçoit l'ordre d'aller se placer en soutien de cette artillerie ; les trois autres compagnies se portent en avant, et la fusillade, une fusillade épouvantable, commence.
A notre gauche les tirailleurs annamites et la Légion ouvrent le feu sur la digue. L'ennemi riposte vivement ; les balles, quelques boulets viennent tomber juste devant les faisceaux de ma compagnie. Tout à coup, vers quatre heures et demie, les clairons sonnent la charge ; c'est le moment de l'assaut. Les 1ère, 2ème, 3ème compagnies de mon bataillon se précipitent la baïonnette au canon. Pendant ce temps ma compagnie reste l'arme au pied, à côté de l'artillerie ; mon capitaine et moi nous regardons, et la même pensée se fait jour dans nos yeux, dernier souvenir aux camarades qui tombent à cette minute.
L'assaut a été épouvantable. Trois compagnies de mon bataillon sont en tête, suivies par un bataillon d'Infanterie de Marine. On entre dans le fortin pour ainsi dire en file indienne, chacun poussant son voisin, et voulant arriver le premier. Au fortin succède un long boyau étroit où tout le monde se heurte, courant en avant. Au bout de 500 mètres une tranchée est enlevée. Cent mètres plus loin une barricade formidable, à un étage, armée de canons. Les Pavillons Noirs lâchent le fortin, parcourant le boyau au pas de course, abandonnant la tranchée et se réfugiant derrière la barricade en terre et en bambous. De là, ils font pleuvoir sur nos hommes une grêle de balles. En un instant le capitaine de la première compagnie est tué ainsi que son aspirant à côté de lui ; le commandant Jounneau tombe blessé, le capitaine de la deuxième compagnie idem ; trois lieutenants français sont blessés, ainsi qu'un sous-lieutenant indigène.
Cent vingt neuf sous-officiers, caporaux et soldats sont tués ou blessés. Tout cela dans les trois premières compagnies de mon bataillon. Un lieutenant d'Infanterie de Marine est mortellement frappé ; le capitaine Doucet des Tirailleurs Annamites est tué raide d'une balle dans la tempe. D'autres officiers tombent, dont j'ignore les noms.
Voici un épisode authentique de la prise de Phu Sa. En arrivant devant la barricade, et devant le feu terrible qui les accueille, les tirailleurs hésitent. Le capitaine de la première compagnie, qui avait mis son casque au bout de son bâton, se retourne et voyant cette hésitation s'écrie : "Ils me quittent, allons nous faire tuer". Il tombe, rééditant le mot de Douai à Wissembourg.
L'espace entre la tranchée et la barricade est abandonné par nous ; nos tirailleurs sont obligés de reculer devant l'incendie que viennent d'allumer les Pavillons Noirs au moyen de fusées. Les cagnas prennent feu.
Bon nombre de blessés y ont été déposés ; impossible de les en retirer. C'est à grand peine qu'on emporte le capitaine de Tirailleurs et le lieutenant de l'Infanterie de Marine. L'incendie gagne, on se retire derrière la tranchée, et là commence un feu terrible qui a duré jusqu'à six heures du matin.
A huit heures, ma compagnie reçoit l'ordre d'aller rejoindre le bataillon. Nous partons et arrivons au fortin sous un clair de lune admirable. L'ennemi du haut de sa barricade dirigeait sur le boyau perpendiculaire un feu nourri. Nous débouchons dans le boyau et nous établissons dans la tranchée parallèle au fleuve de façon à prévenir tout mouvement tournant.
Les balles sifflaient, le canon ennemi tonnait. De gros biscaïens venaient tomber à côté de nous. A dix-sept heures nous recevons l'ordre d'aller relever, à la tranchée parallèle à la barricade, la 3ème compagnie épuisée. La relève d'une compagnie aux prises avec l'ennemi est toujours difficile. Néanmoins il faut y aller. Nous nous avançons dans le boyau ; en cinq minutes deux hommes de ma compagnie sont tués, douze tombent blessés, dont un officier indigène, le lieutenant.
Nous arrivons à la tranchée où nous passons une nuit inoubliable. Le feu n'a pas cessé une minute de onze heures du soir à six heures et demie du matin. Une pluie de projectiles tombait sur nous, rasant nos têtes, allant frapper de tous côtés. Les Pavillons Noirs essaient plusieurs fois de reprendre leur tranchée et par suite le boyau et le fortin, clé de Son Tay. Ils arrivent jusque sur la tranchée et mon sous-lieutenant est obligé de faire usage de son revolver sur un chinois qui monte sur le parapet. Ils essaient de tourner la position, lançant des fusées ; peine perdue.
De temps à autre nous recevons l'ordre de tenir jusqu'au bout à tout prix. Et pourtant les cartouches se font rares. Le capitaine envoie note sur note.
Il nous faut du soutien ; on nous envoie un peloton et des munitions.
Ah ! nous n'avions guère envie de dormir cette nuit là, et pourtant nous étions éreintés. Vers deux heures du matin, les auxiliaires tonkinois qui se trouvaient près de nous prennent peur. Ils voient des chinois partout, se lèvent en désordre, et prennent la fuite. Nos tirailleurs perdant la tête les suivent. Alors mon capitaine, le sous-lieutenant français, le sous-lieutenant indigène et moi nous précipitons le revolver à la main, menaçant de brûler la tête du premier fuyard. Ils reviennent, mais les auxiliaires que la peur affole, chargent leurs armes et nous tirent des coups de fusil dans le dos
C'est miracle que nous n'ayons pas été touchés. Le calme revenu, le capitaine proteste vigoureusement auprès du commandant des auxiliaires qu'on se décide à emmener. Nos tirailleurs sont seuls désormais, et leur feu devenu plus régulier balaye le terrain, et enlève aux chinois l'envie de reprendre l'offensive.
L'amiral Courbet entendait cette fusillade épouvantable. Plusieurs fois il s'est écrié : "Oh ! mon Dieu, pourvu qu'ils tiennent là-bas". Et nous avons tenu, et Phu Sa, la clé de Son Tay, est resté entre nos mains.
Succès chèrement acheté. Nous avons perdu le quart de nos effectifs ; le tiers de nos officiers a été mis hors de combat. Aussi le lendemain je faisais construire, par ordre, une tranchée. L'amiral vient à moi et me dit : "Il ne manque à cette tranchée que des fleurs, lieutenant". "Des immortelles, amiral" lui ai-je répondu. Il a souri et a passé outre.
Désormais le drapeau du 3ème Tirailleurs a un nom de plus à inscrire sur ses plis. Il en a bien le droit ; les chefs et les camarades laissés à Constantine savent que leur régiment a été dignement représenté à cette fête de la mort. Mais ce sont là des victoires à la Pyrrhus ; il n'en faudrait pas beaucoup de cette taille pour diminuer sensiblement nos forces. Aussi je suis convaincu que l'amiral attendra les renforts annoncés pour marcher sur Bac Ninh.
Il faut, en effet, laisser trois bataillons et deux batteries à Son Tay pour garder la place. Ah ! si le lendemain on avait pu marcher sur Bac Ninh, la démoralisation aidant par suite du coup de foudre qui a surpris les Pavillons Noirs, nous serions maîtres aujourd'hui du Nord tout entier. Il faut attendre, mais j'estime qu'avant que cette affaire arrive, l'affaire sera dans le sac, et que chinois et Pavillons Noirs auront mis les pouces. J'ai prononcé le mot chinois à dessein, car les Pavillons en comportaient dans leurs rangs : j'en ai vu.
A six heures du matin le quinze, les Pavillons abandonnent leur barricade, et nous en prenions possession. Elle était armée d'une façon formidable, et construite d'une manière remarquable. Certainement derrière ces scélérats se trouvent des gens distingués, d'un mérite et d'un savoir incontestables ; qui sait, des européens peut-être ? La levée des cadavres se fait. Tous ceux qui, frappés mortellement n'avaient pu se retirer derrière la tranchée, étaient là, les uns carbonisés, les autres le cou coupé.
Pendant la nuit, malgré notre feu meurtrier, l'appât du gain avait poussé les Pavillons Noirs à venir couper les têtes de nos soldats. Nos têtes sont mises à prix et sont payées selon le grade. Nul de nous n'oubliera le spectacle navrant que nous avons eu devant les yeux.
Le seize la fête recommence. La Légion Etrangère en a eu la plus belle part. Quelle troupe admirable au feu ! Quelle régularité dans les mouvements ! Ce n'est plus l'impétuosité farouche de nos tirailleurs, ce n'est point l'élan fataliste qui fait mépriser la mort à nos hommes ; c'est le calme, le sang-froid, et cette discipline au feu que nous ne parvenons pas à obtenir des nôtres. Leurs feux de salve ont été remarquables ; au moment de l'assaut ils y sont allés avec insouciance et fermeté.
Le front de la position était plus étendu, c'est ce qui explique leurs pertes moins élevées que les nôtres. Leur capitaine adjudant major a été tué raide ; deux autres capitaines blessés, quatre-vingts hommes hors de combat. La position a été brillamment enlevée.
A cinq heures et demie on pénétrait dans la ville, et les Pavillons Noirs épouvantés fuyaient en nous canardant. La nuit, pas un coup de fusil et le lendemain, à la surprise générale, on trouvait complètement évacuée la citadelle qui semblait devoir nous coûter encore tant d'efforts.
En résumé, un grand pas a été franchi dans la pacification du Tonkin avec la prise de Son Tay. Reste Bac Ninh. Une fois cette place tombée, tout ne sera pas fini, car il faut distinguer ici entre chinois, Pavillons Noirs et pirates. Les uns quitteront le pays, je le crois, à la suite de la prise de Bac Ninh et d'une solution diplomatique quelconque. Les seconds forment le noyau de la résistance.
Après leur défaite, ils se disperseront et se feront pirates, ressemblant fort par leur manière d'agir aux moustiques qui nous harcèlent. Les pirates pressurent le pays, pillent les villages, inondent la contrée ; ce sont certainement ceux dont l'anéantissement demandera le plus de temps.
Je n'essaierai pas de dépeindre la situation qui régnait dans Son Tay le lendemain de la prise de cette ville. Dans les rues des cadavres partout, les uns brûlés, les autres crispés. Des cagnas en feu, et par dessus tout, le tableau affreux d'un pillage féroce.
L'esprit reste frappé de stupeur quand on s'arrête devant des retranchements élevés par nos ennemis. On se demande comment des gens qui ont montré tant d'opiniâtreté pendant trois jours, ont pu se laisser aller aussi facilement à la démoralisation. Ils eussent résisté comme le premier jour, nous aurions été obligés d'entreprendre un siège en règle, et alors que de sang versé encore et que de temps perdu ! La nouvelle de la prise du fort de Phu Sa est tombée comme un coup de foudre sur leur résolution. Ils se sont concentrés dans la première enceinte : celle-ci ayant été enlevée par la Légion en un après-midi, ils ont pensé que la citadelle ne leur offrait plus assez de garanties.. La peur les a pris et ils se son enfuis dans la nuit. Et cependant elle était fortifiée cette citadelle ! Des canons partout, des canons que la France leur a donnés en 1874, et qu'ils ont retournés contre nous. Impossible de se faire une idée des munitions que nous avons trouvées dans la citadelle. Des cartouches de tous les pays, surtout de provenance anglaise. Les fusils Remington et Winchester dominent.
A minuit, la citadelle était évacuée. Le chef des Pavillons Noirs, Hoang, parent de l'empereur Tu Duc, avait décampé à trois heures de l'après-midi. Il n'avait pas attendu la fin de la danse.
Lieutenant BEYNET
Re: La prise de Son Tay
Porte Est de la citadelle de Son-Tây
Porte Nord(Ouest!) par laquelle les Francais sont entrés dans la ville
Abords de Son-Tây le soir de la prise
Re: La prise de Son Tay
Un complément de cette Bataille .
En 1883 la nouvelle du massacre du cdt riviére et de ses troupes , produit en France une intense émotion. Harcelé par l’opinion publique, le gouvernement de Jules Ferry ordonne des représailles. Le 1" juin 1883, il confie au contre-amiral Courbet - précédemment gouverneur de la Nouvelle-Calédonie, où il a su triompher des pires difficultés - le commandement de la division navale des côtes du Tonkin, qui comprend deux petits cuirassés,sept avisos ou canonnières et deux porte-torpilles.
Son-Tay
Le 30 juillet, Courbet est à Haïphong ; le 16 août, il déclare la côte annamite en état de blocus ; le 18 août, il appareille de Tourane et mouille devant les côtes de Hué. Le débarquement s’effectue le 20 août ; le commandant Parayon s’élance le premier, suivi par 300 matelots et deux sections d’infanterie de-marine. Il progresse malgré le feu nourri des forts. Après une heure de combat, au cours de laquelle nous comptons quelques blessés, pas un seul mort, l’ennemi bat en retraite, abandonnant 600 cadavres sur le terrain. Le 21 août, Courbert fait occuper toute la ligne évacuée et impose un armistice, signé à Hué. En moins de trois semaines, il a vengé le commandant Rivière et rempli sa mission.
Son-Tay
Presque aussitôt, des complications surgissent ; le pouvoir civil tergiverse ; les Pavillons Noirs se regroupent et l’armée régulière chinoise se joint à eux : ils occupent deux puissantes forteresses, Son Tay et Bac Ninh. Il nous faudrait des renforts, ces renforts tardent, et les Chinois se hâtent de prendre l’offensive. Alors, Courbet proclame l’état de siège. Il a préparé son plan et choisi pour objectif Son Tay, en bordure du fleuve Rouge : citadelle édifiée à la Vauban, défendue par une garnison de 2 000 hommes que commande le chef des Pavillons Noirs, Lun Vinh Phuoc, qui fit naguère massacrer Henri Rivière et ses compagnons.
Les hommes sont pourvus de fusils modernes et la place est défendue par 150 canons. Que peut leur opposer Courbet ? Des troupes formées d’éléments disparates à l’excès : turcos d’Alger, tirailleurs cochinchinois, quelques éléments de la Légion étrangère, appuyés par cinq batteries montées à cheval et deux batteries de 65 de marine ; au total, à peine 5 000 combattants. La différence d’idiomes rend plus malaisée encore la cohésion de ces troupes, véritable armée de Babel. Mais le prestige de l’amiral, la stricte discipline qu’il impose à ses hommes - dont, au reste, il sera toujours adoré - le rude entraînement auquel il les a soumis viennent à bout de tous ces obstacles.
Son Tay est protégé par une ceinture de villages que des digues défendent contre la crue des eaux. Deux de ces digues se rejoignent à Phu-Sa. C’est sur ce dernier point que portera le premier effort de Courbet. Le 11 décembre, les Français marchent sur Phu-Sa en deux colonnes, la plus forte menée par le fleuve sous les ordres de l’amiral lui-même ; la deuxième, commandée par le colonel Belin, empruntant la voie de terre. A 3 heures après-midi, la première colonne débarque à 500 mètres en amont du confluent du Day ; le soir, elle atteint la digue et s’y fortifie. La seconde colonne, retardée par les obstacles du terrain, rallie le 13 décembre, à midi. Le 14 décembre, Courbet donne l’assaut à Phu-Sa et s’en empare. Malgré des contreattaques multipliées, les Pavillons Noirs ne peuvent reconquérir la position perdue.
Fort de ce premier succès, Courbet va s’attaquer maintenant à Son Tay. Il s’établit à la porte de l’Ouest avec ses quatre adjoints les colonels Bichot, Belin, Badens et Revillon, cependant que nos batteries tirent sur l’arrière des défenseurs. Après quelques heures de bombardement, l’amiral lance ses hommes à l’assaut, la Légion étrangère en tête. Il est 5 heures du soir. A 6 heures, Courbet pénètre dans la place et met fin au combat ; Lun Vinh Phuoc, à tout jamais déconsidéré par cet échec, a battu en retraite avec ce qui reste de ses soldats, laissant sur le carreau 3000 hommes hors de combat. Nos pertes se chiffrent par 80 morts et 300 blessés.
Plus extrait du Dico de la Légion:
SON TAY : citadelle des Pavillons Noirs de Lun Vinh Phouc en Indochine ; le 16 Décembre 1883 elle fut prise par le 1er Bataillon de Légion du commandant Donnier –unité à fort contingent d’Alsaciens- malgré les 2 500 Chinois et leurs alliés locaux qui la défendaient. La Légion perdra dans l’affrontement 10 hommes, dont le capitaine Mehl, premier officier français tombé en Indochine, et 48 blessés. Le légionnaire Minnaert, figure légendaire du corps, entrera le premier dans la place.
Le 7 mai 1932 un monument à la mémoire des légionnaires morts en Asie fut inauguré.
PAVILLONS NOIRS : sortes de mercenaires chinois mi-pirates mi-soldats, recrutés par l’empereur d’Annam en 1867 pour lutter contre les Français. Leur nom provient des immenses drapeaux de soie qu’ils arboraient. Vivant sur le dos de la population, ils s’opposèrent en de nombreux combats (Tuyen Quang) à la Légion et restèrent même après le traité franco-chinois de 1883. Deux de leurs pavillons pris par les légionnaires avaient été exposés au Musée de la Légion à Sidi Bel Abbés, mais suivant les volontés du commandement de Borelli, ils furent brûlés en 1963 lors du départ du 1er RE pour la métropole.
En 1883 la nouvelle du massacre du cdt riviére et de ses troupes , produit en France une intense émotion. Harcelé par l’opinion publique, le gouvernement de Jules Ferry ordonne des représailles. Le 1" juin 1883, il confie au contre-amiral Courbet - précédemment gouverneur de la Nouvelle-Calédonie, où il a su triompher des pires difficultés - le commandement de la division navale des côtes du Tonkin, qui comprend deux petits cuirassés,sept avisos ou canonnières et deux porte-torpilles.
Son-Tay
Le 30 juillet, Courbet est à Haïphong ; le 16 août, il déclare la côte annamite en état de blocus ; le 18 août, il appareille de Tourane et mouille devant les côtes de Hué. Le débarquement s’effectue le 20 août ; le commandant Parayon s’élance le premier, suivi par 300 matelots et deux sections d’infanterie de-marine. Il progresse malgré le feu nourri des forts. Après une heure de combat, au cours de laquelle nous comptons quelques blessés, pas un seul mort, l’ennemi bat en retraite, abandonnant 600 cadavres sur le terrain. Le 21 août, Courbert fait occuper toute la ligne évacuée et impose un armistice, signé à Hué. En moins de trois semaines, il a vengé le commandant Rivière et rempli sa mission.
Son-Tay
Presque aussitôt, des complications surgissent ; le pouvoir civil tergiverse ; les Pavillons Noirs se regroupent et l’armée régulière chinoise se joint à eux : ils occupent deux puissantes forteresses, Son Tay et Bac Ninh. Il nous faudrait des renforts, ces renforts tardent, et les Chinois se hâtent de prendre l’offensive. Alors, Courbet proclame l’état de siège. Il a préparé son plan et choisi pour objectif Son Tay, en bordure du fleuve Rouge : citadelle édifiée à la Vauban, défendue par une garnison de 2 000 hommes que commande le chef des Pavillons Noirs, Lun Vinh Phuoc, qui fit naguère massacrer Henri Rivière et ses compagnons.
Les hommes sont pourvus de fusils modernes et la place est défendue par 150 canons. Que peut leur opposer Courbet ? Des troupes formées d’éléments disparates à l’excès : turcos d’Alger, tirailleurs cochinchinois, quelques éléments de la Légion étrangère, appuyés par cinq batteries montées à cheval et deux batteries de 65 de marine ; au total, à peine 5 000 combattants. La différence d’idiomes rend plus malaisée encore la cohésion de ces troupes, véritable armée de Babel. Mais le prestige de l’amiral, la stricte discipline qu’il impose à ses hommes - dont, au reste, il sera toujours adoré - le rude entraînement auquel il les a soumis viennent à bout de tous ces obstacles.
Son Tay est protégé par une ceinture de villages que des digues défendent contre la crue des eaux. Deux de ces digues se rejoignent à Phu-Sa. C’est sur ce dernier point que portera le premier effort de Courbet. Le 11 décembre, les Français marchent sur Phu-Sa en deux colonnes, la plus forte menée par le fleuve sous les ordres de l’amiral lui-même ; la deuxième, commandée par le colonel Belin, empruntant la voie de terre. A 3 heures après-midi, la première colonne débarque à 500 mètres en amont du confluent du Day ; le soir, elle atteint la digue et s’y fortifie. La seconde colonne, retardée par les obstacles du terrain, rallie le 13 décembre, à midi. Le 14 décembre, Courbet donne l’assaut à Phu-Sa et s’en empare. Malgré des contreattaques multipliées, les Pavillons Noirs ne peuvent reconquérir la position perdue.
Fort de ce premier succès, Courbet va s’attaquer maintenant à Son Tay. Il s’établit à la porte de l’Ouest avec ses quatre adjoints les colonels Bichot, Belin, Badens et Revillon, cependant que nos batteries tirent sur l’arrière des défenseurs. Après quelques heures de bombardement, l’amiral lance ses hommes à l’assaut, la Légion étrangère en tête. Il est 5 heures du soir. A 6 heures, Courbet pénètre dans la place et met fin au combat ; Lun Vinh Phuoc, à tout jamais déconsidéré par cet échec, a battu en retraite avec ce qui reste de ses soldats, laissant sur le carreau 3000 hommes hors de combat. Nos pertes se chiffrent par 80 morts et 300 blessés.
Plus extrait du Dico de la Légion:
SON TAY : citadelle des Pavillons Noirs de Lun Vinh Phouc en Indochine ; le 16 Décembre 1883 elle fut prise par le 1er Bataillon de Légion du commandant Donnier –unité à fort contingent d’Alsaciens- malgré les 2 500 Chinois et leurs alliés locaux qui la défendaient. La Légion perdra dans l’affrontement 10 hommes, dont le capitaine Mehl, premier officier français tombé en Indochine, et 48 blessés. Le légionnaire Minnaert, figure légendaire du corps, entrera le premier dans la place.
Le 7 mai 1932 un monument à la mémoire des légionnaires morts en Asie fut inauguré.
PAVILLONS NOIRS : sortes de mercenaires chinois mi-pirates mi-soldats, recrutés par l’empereur d’Annam en 1867 pour lutter contre les Français. Leur nom provient des immenses drapeaux de soie qu’ils arboraient. Vivant sur le dos de la population, ils s’opposèrent en de nombreux combats (Tuyen Quang) à la Légion et restèrent même après le traité franco-chinois de 1883. Deux de leurs pavillons pris par les légionnaires avaient été exposés au Musée de la Légion à Sidi Bel Abbés, mais suivant les volontés du commandement de Borelli, ils furent brûlés en 1963 lors du départ du 1er RE pour la métropole.
Dernière édition par commandoair40 le Sam 18 Aoû - 22:22, édité 2 fois
commandoair40- Admin
- Localisation : Marais Poitevin .
Messages : 1542
Date d'inscription : 08/06/2012
Age : 78
83 ans plus tard , du côté Américains .
Toujours dans la même ville , mais pendant la guerre du Vietnam : Etats Unis 1970.
Raid de Son Tay
Date
21 novembre 1970
Lieu
Près de la ville de Son Tay, province de Hà Tây, au Viêt Nam
Issue
Exécution réussie de l'opération mais pas de prisonniers présents sur le site .
Belligérants
États-Unis
Nord-Viêt Nam
Commandants
USA
Brigadier General LeRoy J Manor
Colonel Arthur D. « Bull » Simons
VIETNAM
inconnu
Forces en présence
USA
56 membres des SF
92 aviateurs
29 aéronefs
VIETNAM
inconnu
Pertes
USA
2 blessés, 1 hélicoptère volontairement perdu, 1 avion perdu
VIETNAM
nombres variants de 50 à 200 soldats nord-vietnamiens tués
Le raid de Son Tay (appelé opération Ivory Coast et opération Kingpin) fut une opération spéciale américaine menée pendant la guerre du Viêt Nam et ayant pour but de libérer des prisonniers de guerre américains retenus dans un camp à proximité de Son Tay.
Le raid, mené le 21 novembre 1970, fut correctement exécuté mais ne permit pas de libérer de prisonniers car ceux-ci avaient été déplacés dans un autre camp quelques mois plus tôt.
Bien que l'objectif principal du raid n'ait pu être atteint, l'opération est considérée comme un succès relatif car l'assaut fut correctement mené, le bilan des pertes largement en faveur des Américains, et les conséquences indirectes du raid furent favorables aux prisonniers de guerre américains retenus au Viêt Nam.
L'opération .
Préparation .
Le raid de Son Tay était la partie finale d'une opération en trois phases. La conception d'une opération de sauvetage de prisonniers de guerre américains au Nord Viêt Nam commença en mai 1970 avec l'identification de petits camps de prisonniers sur des photographies aériennes, parmi lesquels celui situé près de Son Tay, la capitale de la province de Son Tây (province qui a été fusionnée avec celle de Hà Dông au sein de la province de Hà Tây en 1965) sur la rivière Song Con, à une quarantaine de kilomètres à l'ouest de Hanoï.
L'idée de mener un raid fut proposée en mai 1970 par le brigadier general Donald D. Blackburn, assistant spécial pour la contre-insurrection et les activités spéciales (Special Assistant for Counterinsurgency and Special Activities, SACSA) au général Earle G. Wheeler, alors président du comité des chefs d'États-majors interarmes. Wheeler autorisa le 10 juillet un groupe de planification de 15 membres à étudier la faisabilité d'un raid. Travaillant avec des experts de la CIA et de la DIA, Blackburn développa un plan connu sous le nom de code Polar Circle (« cercle polaire »). Ce plan s'intéressa au camp de Son Tay, les renseignements issus de l'analyse des photos aériennes prises notamment par des Lockheed SR-71 Blackbird et des drones Ryan AQM-34L/M Buffalo Hunter conduisant à supposer qu'au moins 50 et peut-être jusqu'à 100 prisonniers américains s'y trouvaient (il fut par la suite établit que 57 prisonniers s'y trouvaient effectivement à l'époque). Le plan fut accepté par le JCS en juillet et reçu une classification top secret.
Organisation de la mission .
La seconde phase, appelée opération Ivory Coast (« Côte d'Ivoire »), commença le 8 août 1970 quand l'amiral Thomas H. Moorer, le nouveau président du comité des chefs d'États-majors interarmes, désigna le Brigadier General LeRoy J. Manor et le colonel Arthur D. "Bull" Simons respectivement commandant et commandant adjoint de l'opération. Ivory Coast concernait la phase d'organisation, de planification, d'entraînement et de déploiement des forces de l'opération.
Le général Manor créa un complexe d'entraînement à Eglin Air Force Base en Floride et rassembla un groupe de planification de 27 personnes. Le colonel Simons recruta ses hommes à Fort Bragg parmi les bérets verts; plusieurs centaines d'entre eux se portèrent volontaire en ne sachant que la mission serait « dangereuse » et que Simons serait commandant. Simons sélectionna 15 officiers et 82 sous-officiers venant principalement des 6th et 7th SFG et les emmena à Eglin. On donna à cette force le nom volontairement ambigu de Joint Contingency Task Group (JCTG, « groupe interarmées de travail de contingence »).
Le personnel de planification établit les paramètres d'un raid de nuit, dont les points essentiels étaient une temps clair et un quart de lune à 35 degrés au-dessus de l'horizon pour avoir une visibilité optimale. De ces paramètres découlèrent deux « fenêtres » pour le raid, entre les 21 et 25 octobre ou entre les 21 et 25 novembre.
Le plan .
L'assaut devait être mené par trois groupes de Special Forces : un groupe de 14 hommes, appelé Blueboy et commandé par le capitaine Richard J. « Dick » Meadows, devait atterrir dans la cour de la prison ; un groupe de 22 hommes appelé Greenleaf et commandé par le colonel Simons devait s'introduire dans la prison (en faisant sauter un mur extérieur) pour appuyer Blueboy ; enfin, un groupe de 20 hommes appelé Redwine commandé par le lieutenant-colonel Eliott P. « Bud » Sydnor devait sécuriser les alentours de la prison pour arrêter toute contre-attaque nord-vietnamienne.
Les commandos devaient être emmenés à pied d'œuvre par des hélicoptères HH-53 Super Jolly Green Giant. Les équipages furent choisis parmi les unités de sauvetage des pilotes éjectés en territoire hostile, habitués aux vols de nuit à basse altitude. Un des problèmes était de réussir à débarquer le groupe d'assaut dans l'étroite cour de la prison, qui rendait difficile l'atterrissage d'un HH-53. L'appareil risquait notamment de toucher des arbres de la cour avec son rotor. On retint finalement l'idée de perdre volontairement un HH-3 Jolly Green Giant (appareil un peu plus petit que les HH-53) en le faisant se poser dans la cour avec toutes les chances que son rotor soit détruit, ce qui permettrait de débarquer rapidement le groupe d'assaut (le groupe et l'équipage du HH-3 devant être récupérés par d'autres hélicoptères une fois la mission terminée). Un HC-130 devrait ravitailler de nuit les hélicoptères en vol, et deux MC-130 équipés d'un nouvel équipement de navigation infrarouge guideraient la formation.
Le général Manor et le colonel Simons rencontrèrent l'amiral Fred Bardshar, commandant la Task Force 77, pour que celui-ci organise une diversion aérienne avec les appareils des porte-avions de la Task Force. À cause de la politique du moment de ne pas bombarder le Nord Viêt Nam, les avions ne porteraient pas d'armement air-sol à part ceux chargés des missions de sauvetage des pilotes éventuellement abattus.
Une maquette à taille réduite du complexe de la prison, appelée « Barbara » et d'un prix de 60 000 $, équipée d'un système d'illumination permettant de simuler tous types d'éclairages (nuit, pleine lune, fusées éclairantes, etc.) fut construite.
Les bérets verts répétèrent l'assaut sur une maquette à taille réelle particulièrement réaliste de la prison à 171 reprises, envisageant tous les imprévus possibles. Cette maquette devait être démontée le jour pour éviter qu'elle ne soit repérée par le satellite espion soviétique Cosmos 355 qui survolait la Floride toutes les douze heures. Les équipages d'hélicoptères effectuèrent 1054 heures de vol d'entraînement en 268 sorties au cours desquelles ils s'entraînèrent au vol en formation et ravitaillement en vol nocturnes. L'équipage du HH-3 fit 31 atterrissages nocturnes dans la cour de la maquette.
Un des problèmes rencontrés était la précision du tir de nuit des commandos : après une répétition, on s'aperçut que les bérets verts plaçaient moins de 25% des balles tirées dans des cibles de la taille d'un humain à 50 mètres de distance. Cherchant une solution, le colonel Simons apprit qu'il n'existait que le seul viseur nocturne monté sur armes légères était l'AN/PVS-4 dont il n'existait alors que six prototypes. La légende dit que Simons et son armurier tombèrent sur une publicité pour un viseur nocturne d'origine britannique vendu dans le civil dans un magazine (American Rifleman ou Guns & Ammo selon les versions de l'histoire). Le viseur était le Singlepoint1fabriqué par Armson et distribué aux USA par Armalite au prix de 49,50 $ pièce. Après avoir testé deux exemplaires qui se montrèrent très performants, Simons acheta assez de viseurs pour équiper les 56 hommes de l'assaut.
Le 24 septembre, le général Manor rapportait au secrétaire à la Défense Melvin Laid que le JCTG était prêt pour la fenêtre d'octobre, mais suite à un entretien à la Maison Blanche avec le conseiller à la sécurité nationale Henry Kissinger le 8 octobre, la mission, fut reportée en novembre. Ce délai augmentait les risques de compromettre le secret de la mission mais avait l'avantage de permettre des entraînements supplémentaires, d'acquérir les viseurs nocturnes et d'obtenir plus de photos aériennes de la prison.
Du 10 au 17 novembre, le JCTG se déploya sur la base aérienne d'Udon en Thaïlande. Les prévisions météo indiquaient que le typhon Patsy devait causer du mauvais temps sur le Nord Viêt Nam pendant toute la fenêtre de novembre mais que les conditions du 20 novembre seraient acceptables. Le général Manor avança l'opération de 24 heures.
Le raid .
Le 18 novembre, le président Richard Nixon approuva l'exécution de la phase finale de l'opération, le raid appelé opération Kingpin (« cheville ouvrière »).
105 aéronefs (46 de l'US Air Force et 59 de l'US Navy) participèrent à la mission, dont 29 appareils (avec 92 aviateurs) directement impliqués dans le raid .
Les bérets verts dans un des hélicoptères, en route pour le raid
Les 56 raiders emportaient 48 fusils XM177 Colt Commando, 2 M16, 2 fusils à pompe, 4 lance-grenades M79 et 4 mitrailleuses M60, 51 armes de poing, 213 grenades à main, 11 charges explosives et 15 mines Claymore. Chacun avait une radio de secours, et ils étaient équipés d'une pléthore de coupe-câbles, coupe-boulons, scies, pieds-de-biche, cordes, porte-voix et autres équipements.
À 23h25 le 20 novembre 1970, les hélicoptères décollèrent de la base d'Udon. Peu après minuit, les MC-130 Combat Talon et A-1 Skyraiders firent de même à la base aérienne thaïlandaise de Nakhon. À partir de 01h23 les appareils de la Navy décollèrent des porte-avions USS Oriskany (CV-34), USS Ranger (CV-61) et USS Hancock (CV-19) et approchèrent la côte nord-vietnamienne par l'est, déclenchant une importante alerte dans la défense antiaérienne nord-vietnammienne à partir de 02h17 et fournissant une diversion efficace pour les hélicoptères du raid qui approchaient par l'ouest.
L'assaut commença à 02h18 quand un MC-130 largua des fusées éclairantes sur la prison et que Apple 3 ouvrit le feu avec ses deux miniguns sur les tours de garde de la prison. Peu après le HH-3 se posa dans un « crash contrôlé » dans la cour de la prison, et le groupe d'assaut Blueboy prit immédiatement d'assaut la prison. Sa seule perte fut un aviateur qui se cassa la cheville dans le crash.
Vue aérienne de la zone, montrant la ville de Son Tây, la prison et « l'école secondaire » environ 400 mètres au sud de la prison
Le groupe de commandement Greenleaf se posa à 02h21 et comprit presque immédiatement que l'hélicoptère ne les avait pas déposés au bon endroit mais près d'un complexe similaire à celui de la prison, situé 400 mètres plus au sud. Le complexe en question avait été identifié comme une « école secondaire » d'après les photographies aériennes mais il s'agissait en fait d'une caserne de soldats nord-vietnamiens. Le colonel Simons décida d'attaquer immédiatement cette concentration imprévue de soldats ennemis susceptible de mettre en danger l'opération. En cinq minutes de combat, ayant l'avantage de la surprise, les Américains estimèrent avoir tué 100 à 200 soldats ennemis sans pertes de leur côté. À 02h26 le groupe Greenleaf rembarqua dans son hélicoptère qui les déposa à la zone d'atterrissage initialement prévue.
Le groupe de soutien Redwine s'était posé à 02h21 à proximité de la prison de Son Tay et avait pris en charge les tâches assignées à Greenleaf comme le prévoyait les plans au cas où Greenleaf serait indisponible. Pendant ce temps, le groupe Blueboy fouilla la prison pour découvrir qu'aucun prisonnier américain ne s'y trouvait (les Américains apprirent par la suite que les 57 prisonniers présents à Son Tay avaient été déplacés dans un camp à 13 kilomètres de là en juillet par crainte des crues de la rivière Song Con). Meadows envoya par radio le message Negative Items (« objets : négatif ») et les raiders commencèrent à évacuer.
À 02h36 eu lieu la première extraction par hélicoptère, suivie de la seconde à 02h45. Les commandos étaient restés au sol seulement 27 minutes. Tous les commandos furent comptés (on crut au début qu'un d'entre eux avait été oublié). L'un d'entre eux avait été blessé à la jambe et était la seule perte causée par l'ennemi.
Pendant le raid, d'autres diversions avaient été effectuées, y compris en larguant des fusées éclairantes et des « simulateurs de fusillades » sur d'autres zones pour tromper l'ennemi sur le lieu réel des combats. Au moins 18 missiles sol-air furent tirés sur la force du raid, sans résultat. Deux F-105 furent endommagés, l'un parvint à retourner à la base mais l'équipage du second dut s'éjecter au-dessus du Laos ; il fut récupéré par deux des HH-53 de la force du raid. À 03h15, celle-ci avait quitté le Nord Viêt Nam et se posa à Udon à 04h28.
Bilan .
Ecusson commémoratif du raid
L'opération fut considérée comme un « succès tactique » car elle avait été correctement exécutée, mais elle n'atteint pas son objectif principal qui était la libération de prisonniers. Ce fut un important échec pour les services de renseignement. Des décennies plus tard, des documents déclassifiés révélèrent que la veille du raid, une estimation des renseignements avertissait qu'il était possible que les prisonniers aient été déplacés dans une autre prison située une vingtaine de kilomètres plus loin (c'est ce qui s'était effectivement produit). L'opération était cependant à un stade trop avancé pour changer d'objectif à ce moment-là.
Dans un premier temps, l'opération fut considérée comme un échec par l'opinion publique. Les lendemains du raid furent amers pour les commandos. Le sénateur Robert Dole proposa une résolution félicitant les commandos, arguant : « Certains de ces hommes se languissent en prison depuis cinq ans. ». Le sénateur Kennedy répliqua : « Et ils y sont encore ! ». Le colonel « Bull » Simons (médaillé de la Distinguished Service Cross par le président Nixon en personne) s'indigna quand il apprit que la moitié de ses hommes ne recevraient que la médaille de l'armée et avertit l'adjoint du chef d'état major de l'armée que « un de [ses] hommes risque fort de dire en public à M. Laird où il peut mettre sa décoration ». Finalement, les membres de la force du raid reçurent 6 Distinguished Service Cross, 5 Air Force Crosses et 83 Silver Stars, tous les bérets verts étant médaillés. Simons fut déçu par l'attitude de l'opinion envers ses hommes jusqu'à ce que le milliardaire Ross Perot organise une grande réception à San Francisco pour tous les commandos de Son Tay en 1973. Simons se sentira une dette envers Perot qui le conduira à accepter de mener une opération pour sauver deux employés de Perot emprisonnés arbitrairement en Iran en 1978.
Toutefois à plus long terme, le raid de Son Tay eut des conséquences indirectes favorables aux prisonniers de guerre américains retenus au Viêt Nam. Les Nord-vietnamiens regroupèrent les prisonniers dans deux prisons principales mieux défendables contre un autre raid. En conséquence, beaucoup se retrouvèrent en contact avec d'autres américains (alors qu'ils étaient isolés auparavant), contribuant à améliorer leur moral. D'autant plus que certains d'entre eux eurent connaissance du raid par des américains faits prisonniers après le raid. Les nord-vietnamiens améliorèrent le traitement des prisonniers, augmentant les quantités de nourriture et arrêtant les mauvais traitements qui étaient courants auparavant. La mortalité des prisonniers baissa considérablement et on estime que le raid de Son Tay a indirectement sauvé la vie de milliers de prisonniers.
D'un point de vue militaire, l'opération fut un succès car elle fut correctement exécutée, que le bilan des pertes fut nettement en faveur des américains, et qu'elle était la première opération réellement interarmes. Sur ce point, elle contraste drastiquement avec l'opération Eagle Claw qui eut lieu près de dix ans plus tard.
Références .
Benjamin Schemmer, The Raid
Leroy Thompson, US Elite forces - Vietnam, Squadron Signal publications, Carrollton, Texas, 1985
Son Tay Raider Association
THE SON TAY RAID NOVEMBER 21, 1970 par le Lieutenant General LeRoy J. Manor de l'USAF (ret.)
"The Son Tay Raid" dans Air Force Magazine novembre 1995, Vol. 78 No. 11
Operation Kingpin: The Son Tay Raid sur SpecialOperations.Com
Operation Ivory Coast/Operation Kingpin sur GlobalSecurity.org
Son Tay Prison Raid sur The Vietnam War.com
Raid de Son Tay
Date
21 novembre 1970
Lieu
Près de la ville de Son Tay, province de Hà Tây, au Viêt Nam
Issue
Exécution réussie de l'opération mais pas de prisonniers présents sur le site .
Belligérants
États-Unis
Nord-Viêt Nam
Commandants
USA
Brigadier General LeRoy J Manor
Colonel Arthur D. « Bull » Simons
VIETNAM
inconnu
Forces en présence
USA
56 membres des SF
92 aviateurs
29 aéronefs
VIETNAM
inconnu
Pertes
USA
2 blessés, 1 hélicoptère volontairement perdu, 1 avion perdu
VIETNAM
nombres variants de 50 à 200 soldats nord-vietnamiens tués
Le raid de Son Tay (appelé opération Ivory Coast et opération Kingpin) fut une opération spéciale américaine menée pendant la guerre du Viêt Nam et ayant pour but de libérer des prisonniers de guerre américains retenus dans un camp à proximité de Son Tay.
Le raid, mené le 21 novembre 1970, fut correctement exécuté mais ne permit pas de libérer de prisonniers car ceux-ci avaient été déplacés dans un autre camp quelques mois plus tôt.
Bien que l'objectif principal du raid n'ait pu être atteint, l'opération est considérée comme un succès relatif car l'assaut fut correctement mené, le bilan des pertes largement en faveur des Américains, et les conséquences indirectes du raid furent favorables aux prisonniers de guerre américains retenus au Viêt Nam.
L'opération .
Préparation .
Le raid de Son Tay était la partie finale d'une opération en trois phases. La conception d'une opération de sauvetage de prisonniers de guerre américains au Nord Viêt Nam commença en mai 1970 avec l'identification de petits camps de prisonniers sur des photographies aériennes, parmi lesquels celui situé près de Son Tay, la capitale de la province de Son Tây (province qui a été fusionnée avec celle de Hà Dông au sein de la province de Hà Tây en 1965) sur la rivière Song Con, à une quarantaine de kilomètres à l'ouest de Hanoï.
L'idée de mener un raid fut proposée en mai 1970 par le brigadier general Donald D. Blackburn, assistant spécial pour la contre-insurrection et les activités spéciales (Special Assistant for Counterinsurgency and Special Activities, SACSA) au général Earle G. Wheeler, alors président du comité des chefs d'États-majors interarmes. Wheeler autorisa le 10 juillet un groupe de planification de 15 membres à étudier la faisabilité d'un raid. Travaillant avec des experts de la CIA et de la DIA, Blackburn développa un plan connu sous le nom de code Polar Circle (« cercle polaire »). Ce plan s'intéressa au camp de Son Tay, les renseignements issus de l'analyse des photos aériennes prises notamment par des Lockheed SR-71 Blackbird et des drones Ryan AQM-34L/M Buffalo Hunter conduisant à supposer qu'au moins 50 et peut-être jusqu'à 100 prisonniers américains s'y trouvaient (il fut par la suite établit que 57 prisonniers s'y trouvaient effectivement à l'époque). Le plan fut accepté par le JCS en juillet et reçu une classification top secret.
Organisation de la mission .
La seconde phase, appelée opération Ivory Coast (« Côte d'Ivoire »), commença le 8 août 1970 quand l'amiral Thomas H. Moorer, le nouveau président du comité des chefs d'États-majors interarmes, désigna le Brigadier General LeRoy J. Manor et le colonel Arthur D. "Bull" Simons respectivement commandant et commandant adjoint de l'opération. Ivory Coast concernait la phase d'organisation, de planification, d'entraînement et de déploiement des forces de l'opération.
Le général Manor créa un complexe d'entraînement à Eglin Air Force Base en Floride et rassembla un groupe de planification de 27 personnes. Le colonel Simons recruta ses hommes à Fort Bragg parmi les bérets verts; plusieurs centaines d'entre eux se portèrent volontaire en ne sachant que la mission serait « dangereuse » et que Simons serait commandant. Simons sélectionna 15 officiers et 82 sous-officiers venant principalement des 6th et 7th SFG et les emmena à Eglin. On donna à cette force le nom volontairement ambigu de Joint Contingency Task Group (JCTG, « groupe interarmées de travail de contingence »).
Le personnel de planification établit les paramètres d'un raid de nuit, dont les points essentiels étaient une temps clair et un quart de lune à 35 degrés au-dessus de l'horizon pour avoir une visibilité optimale. De ces paramètres découlèrent deux « fenêtres » pour le raid, entre les 21 et 25 octobre ou entre les 21 et 25 novembre.
Le plan .
L'assaut devait être mené par trois groupes de Special Forces : un groupe de 14 hommes, appelé Blueboy et commandé par le capitaine Richard J. « Dick » Meadows, devait atterrir dans la cour de la prison ; un groupe de 22 hommes appelé Greenleaf et commandé par le colonel Simons devait s'introduire dans la prison (en faisant sauter un mur extérieur) pour appuyer Blueboy ; enfin, un groupe de 20 hommes appelé Redwine commandé par le lieutenant-colonel Eliott P. « Bud » Sydnor devait sécuriser les alentours de la prison pour arrêter toute contre-attaque nord-vietnamienne.
Les commandos devaient être emmenés à pied d'œuvre par des hélicoptères HH-53 Super Jolly Green Giant. Les équipages furent choisis parmi les unités de sauvetage des pilotes éjectés en territoire hostile, habitués aux vols de nuit à basse altitude. Un des problèmes était de réussir à débarquer le groupe d'assaut dans l'étroite cour de la prison, qui rendait difficile l'atterrissage d'un HH-53. L'appareil risquait notamment de toucher des arbres de la cour avec son rotor. On retint finalement l'idée de perdre volontairement un HH-3 Jolly Green Giant (appareil un peu plus petit que les HH-53) en le faisant se poser dans la cour avec toutes les chances que son rotor soit détruit, ce qui permettrait de débarquer rapidement le groupe d'assaut (le groupe et l'équipage du HH-3 devant être récupérés par d'autres hélicoptères une fois la mission terminée). Un HC-130 devrait ravitailler de nuit les hélicoptères en vol, et deux MC-130 équipés d'un nouvel équipement de navigation infrarouge guideraient la formation.
Le général Manor et le colonel Simons rencontrèrent l'amiral Fred Bardshar, commandant la Task Force 77, pour que celui-ci organise une diversion aérienne avec les appareils des porte-avions de la Task Force. À cause de la politique du moment de ne pas bombarder le Nord Viêt Nam, les avions ne porteraient pas d'armement air-sol à part ceux chargés des missions de sauvetage des pilotes éventuellement abattus.
Une maquette à taille réduite du complexe de la prison, appelée « Barbara » et d'un prix de 60 000 $, équipée d'un système d'illumination permettant de simuler tous types d'éclairages (nuit, pleine lune, fusées éclairantes, etc.) fut construite.
Les bérets verts répétèrent l'assaut sur une maquette à taille réelle particulièrement réaliste de la prison à 171 reprises, envisageant tous les imprévus possibles. Cette maquette devait être démontée le jour pour éviter qu'elle ne soit repérée par le satellite espion soviétique Cosmos 355 qui survolait la Floride toutes les douze heures. Les équipages d'hélicoptères effectuèrent 1054 heures de vol d'entraînement en 268 sorties au cours desquelles ils s'entraînèrent au vol en formation et ravitaillement en vol nocturnes. L'équipage du HH-3 fit 31 atterrissages nocturnes dans la cour de la maquette.
Un des problèmes rencontrés était la précision du tir de nuit des commandos : après une répétition, on s'aperçut que les bérets verts plaçaient moins de 25% des balles tirées dans des cibles de la taille d'un humain à 50 mètres de distance. Cherchant une solution, le colonel Simons apprit qu'il n'existait que le seul viseur nocturne monté sur armes légères était l'AN/PVS-4 dont il n'existait alors que six prototypes. La légende dit que Simons et son armurier tombèrent sur une publicité pour un viseur nocturne d'origine britannique vendu dans le civil dans un magazine (American Rifleman ou Guns & Ammo selon les versions de l'histoire). Le viseur était le Singlepoint1fabriqué par Armson et distribué aux USA par Armalite au prix de 49,50 $ pièce. Après avoir testé deux exemplaires qui se montrèrent très performants, Simons acheta assez de viseurs pour équiper les 56 hommes de l'assaut.
Le 24 septembre, le général Manor rapportait au secrétaire à la Défense Melvin Laid que le JCTG était prêt pour la fenêtre d'octobre, mais suite à un entretien à la Maison Blanche avec le conseiller à la sécurité nationale Henry Kissinger le 8 octobre, la mission, fut reportée en novembre. Ce délai augmentait les risques de compromettre le secret de la mission mais avait l'avantage de permettre des entraînements supplémentaires, d'acquérir les viseurs nocturnes et d'obtenir plus de photos aériennes de la prison.
Du 10 au 17 novembre, le JCTG se déploya sur la base aérienne d'Udon en Thaïlande. Les prévisions météo indiquaient que le typhon Patsy devait causer du mauvais temps sur le Nord Viêt Nam pendant toute la fenêtre de novembre mais que les conditions du 20 novembre seraient acceptables. Le général Manor avança l'opération de 24 heures.
Le raid .
Le 18 novembre, le président Richard Nixon approuva l'exécution de la phase finale de l'opération, le raid appelé opération Kingpin (« cheville ouvrière »).
105 aéronefs (46 de l'US Air Force et 59 de l'US Navy) participèrent à la mission, dont 29 appareils (avec 92 aviateurs) directement impliqués dans le raid .
Les bérets verts dans un des hélicoptères, en route pour le raid
Les 56 raiders emportaient 48 fusils XM177 Colt Commando, 2 M16, 2 fusils à pompe, 4 lance-grenades M79 et 4 mitrailleuses M60, 51 armes de poing, 213 grenades à main, 11 charges explosives et 15 mines Claymore. Chacun avait une radio de secours, et ils étaient équipés d'une pléthore de coupe-câbles, coupe-boulons, scies, pieds-de-biche, cordes, porte-voix et autres équipements.
À 23h25 le 20 novembre 1970, les hélicoptères décollèrent de la base d'Udon. Peu après minuit, les MC-130 Combat Talon et A-1 Skyraiders firent de même à la base aérienne thaïlandaise de Nakhon. À partir de 01h23 les appareils de la Navy décollèrent des porte-avions USS Oriskany (CV-34), USS Ranger (CV-61) et USS Hancock (CV-19) et approchèrent la côte nord-vietnamienne par l'est, déclenchant une importante alerte dans la défense antiaérienne nord-vietnammienne à partir de 02h17 et fournissant une diversion efficace pour les hélicoptères du raid qui approchaient par l'ouest.
L'assaut commença à 02h18 quand un MC-130 largua des fusées éclairantes sur la prison et que Apple 3 ouvrit le feu avec ses deux miniguns sur les tours de garde de la prison. Peu après le HH-3 se posa dans un « crash contrôlé » dans la cour de la prison, et le groupe d'assaut Blueboy prit immédiatement d'assaut la prison. Sa seule perte fut un aviateur qui se cassa la cheville dans le crash.
Vue aérienne de la zone, montrant la ville de Son Tây, la prison et « l'école secondaire » environ 400 mètres au sud de la prison
Le groupe de commandement Greenleaf se posa à 02h21 et comprit presque immédiatement que l'hélicoptère ne les avait pas déposés au bon endroit mais près d'un complexe similaire à celui de la prison, situé 400 mètres plus au sud. Le complexe en question avait été identifié comme une « école secondaire » d'après les photographies aériennes mais il s'agissait en fait d'une caserne de soldats nord-vietnamiens. Le colonel Simons décida d'attaquer immédiatement cette concentration imprévue de soldats ennemis susceptible de mettre en danger l'opération. En cinq minutes de combat, ayant l'avantage de la surprise, les Américains estimèrent avoir tué 100 à 200 soldats ennemis sans pertes de leur côté. À 02h26 le groupe Greenleaf rembarqua dans son hélicoptère qui les déposa à la zone d'atterrissage initialement prévue.
Le groupe de soutien Redwine s'était posé à 02h21 à proximité de la prison de Son Tay et avait pris en charge les tâches assignées à Greenleaf comme le prévoyait les plans au cas où Greenleaf serait indisponible. Pendant ce temps, le groupe Blueboy fouilla la prison pour découvrir qu'aucun prisonnier américain ne s'y trouvait (les Américains apprirent par la suite que les 57 prisonniers présents à Son Tay avaient été déplacés dans un camp à 13 kilomètres de là en juillet par crainte des crues de la rivière Song Con). Meadows envoya par radio le message Negative Items (« objets : négatif ») et les raiders commencèrent à évacuer.
À 02h36 eu lieu la première extraction par hélicoptère, suivie de la seconde à 02h45. Les commandos étaient restés au sol seulement 27 minutes. Tous les commandos furent comptés (on crut au début qu'un d'entre eux avait été oublié). L'un d'entre eux avait été blessé à la jambe et était la seule perte causée par l'ennemi.
Pendant le raid, d'autres diversions avaient été effectuées, y compris en larguant des fusées éclairantes et des « simulateurs de fusillades » sur d'autres zones pour tromper l'ennemi sur le lieu réel des combats. Au moins 18 missiles sol-air furent tirés sur la force du raid, sans résultat. Deux F-105 furent endommagés, l'un parvint à retourner à la base mais l'équipage du second dut s'éjecter au-dessus du Laos ; il fut récupéré par deux des HH-53 de la force du raid. À 03h15, celle-ci avait quitté le Nord Viêt Nam et se posa à Udon à 04h28.
Bilan .
Ecusson commémoratif du raid
L'opération fut considérée comme un « succès tactique » car elle avait été correctement exécutée, mais elle n'atteint pas son objectif principal qui était la libération de prisonniers. Ce fut un important échec pour les services de renseignement. Des décennies plus tard, des documents déclassifiés révélèrent que la veille du raid, une estimation des renseignements avertissait qu'il était possible que les prisonniers aient été déplacés dans une autre prison située une vingtaine de kilomètres plus loin (c'est ce qui s'était effectivement produit). L'opération était cependant à un stade trop avancé pour changer d'objectif à ce moment-là.
Dans un premier temps, l'opération fut considérée comme un échec par l'opinion publique. Les lendemains du raid furent amers pour les commandos. Le sénateur Robert Dole proposa une résolution félicitant les commandos, arguant : « Certains de ces hommes se languissent en prison depuis cinq ans. ». Le sénateur Kennedy répliqua : « Et ils y sont encore ! ». Le colonel « Bull » Simons (médaillé de la Distinguished Service Cross par le président Nixon en personne) s'indigna quand il apprit que la moitié de ses hommes ne recevraient que la médaille de l'armée et avertit l'adjoint du chef d'état major de l'armée que « un de [ses] hommes risque fort de dire en public à M. Laird où il peut mettre sa décoration ». Finalement, les membres de la force du raid reçurent 6 Distinguished Service Cross, 5 Air Force Crosses et 83 Silver Stars, tous les bérets verts étant médaillés. Simons fut déçu par l'attitude de l'opinion envers ses hommes jusqu'à ce que le milliardaire Ross Perot organise une grande réception à San Francisco pour tous les commandos de Son Tay en 1973. Simons se sentira une dette envers Perot qui le conduira à accepter de mener une opération pour sauver deux employés de Perot emprisonnés arbitrairement en Iran en 1978.
Toutefois à plus long terme, le raid de Son Tay eut des conséquences indirectes favorables aux prisonniers de guerre américains retenus au Viêt Nam. Les Nord-vietnamiens regroupèrent les prisonniers dans deux prisons principales mieux défendables contre un autre raid. En conséquence, beaucoup se retrouvèrent en contact avec d'autres américains (alors qu'ils étaient isolés auparavant), contribuant à améliorer leur moral. D'autant plus que certains d'entre eux eurent connaissance du raid par des américains faits prisonniers après le raid. Les nord-vietnamiens améliorèrent le traitement des prisonniers, augmentant les quantités de nourriture et arrêtant les mauvais traitements qui étaient courants auparavant. La mortalité des prisonniers baissa considérablement et on estime que le raid de Son Tay a indirectement sauvé la vie de milliers de prisonniers.
D'un point de vue militaire, l'opération fut un succès car elle fut correctement exécutée, que le bilan des pertes fut nettement en faveur des américains, et qu'elle était la première opération réellement interarmes. Sur ce point, elle contraste drastiquement avec l'opération Eagle Claw qui eut lieu près de dix ans plus tard.
Références .
Benjamin Schemmer, The Raid
Leroy Thompson, US Elite forces - Vietnam, Squadron Signal publications, Carrollton, Texas, 1985
Son Tay Raider Association
THE SON TAY RAID NOVEMBER 21, 1970 par le Lieutenant General LeRoy J. Manor de l'USAF (ret.)
"The Son Tay Raid" dans Air Force Magazine novembre 1995, Vol. 78 No. 11
Operation Kingpin: The Son Tay Raid sur SpecialOperations.Com
Operation Ivory Coast/Operation Kingpin sur GlobalSecurity.org
Son Tay Prison Raid sur The Vietnam War.com
commandoair40- Admin
- Localisation : Marais Poitevin .
Messages : 1542
Date d'inscription : 08/06/2012
Age : 78
Sujets similaires
» La Prise d'Ischeriden
» la prise de Constantine
» Prise d’otages de Loyada
» Prise d’otages de Loyada
» Prise d'otages de Loyada le 3/2/1976
» la prise de Constantine
» Prise d’otages de Loyada
» Prise d’otages de Loyada
» Prise d'otages de Loyada le 3/2/1976
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Ven 31 Mar - 9:55 par commandoair40
» 1 septembre 2015
Mar 1 Sep - 18:39 par olivier
» Visiteurs sur le forum 2014
Mar 1 Sep - 18:34 par olivier
» Janvier 1885 - La Légion étrangère à Tuyen Quang au Tonkin.
Sam 18 Jan - 8:07 par ROBERT
» loto et bourse aux armes
Lun 13 Jan - 11:13 par Invité
» Dimanche 12 Janvier 2014
Dim 12 Jan - 12:17 par Invité
» Samedi 11Janvier 2014
Sam 11 Jan - 18:19 par Gibert j
» Le mémorial du 2°REI
Sam 11 Jan - 12:09 par Gibert j
» vendredi 10 janvier 2014
Ven 10 Jan - 20:38 par Gibert j
» Commandant Dupin
Jeu 9 Jan - 20:39 par Gibert j
» Jeudi 9 janvier 2014
Jeu 9 Jan - 20:34 par Gibert j
» Mercredi 8 Janvier 2014
Mer 8 Jan - 21:54 par Gibert j